Un état de Droit à reconstruire à la Libération


- La légalité de son pouvoir étant affirmée, il lui faut ensuite s'imposer comme le détenteur d'une autorité  incontestée. Le général de Gaulle commence par refuser de proclamer la République au balcon de l'Hôtel de Ville : il  ne reconnaît pas  l'existence "l'Etat Français" (le nom pris par l'Administration sous la dictature assumée par Pétain depuis Vichy) à ses yeux régime "nul et non avenu" - négligeant délibérément  le fait que c'est le parlement qui a investi Philippe Pétain. Charles de Gaulle  affecte de considérer qu'il a assumé la continuité de l'Etat de 1940 à 1945.  Il fait donc office à la Libération de chef du gouvernement (et, sans en avoir le titre, de chef de l'Etat) alors qu'il n'a pas été désigné lui même par un vote démocratique. Le GPRF et son chef  parlent au nom de la France, édictent des lois, nomment les fonctionnaires et leur donnent des instructions, sans rencontrer d'opposition sérieuse, car ils sont soutenus par les partis politiques et l'opinion publique.

- Le GPRF doit démontrer également que son pouvoir est d'essence démocratique. Charles de Gaulle, ostensiblement  soutenu par les forces issues de la Résistance (partis, syndicats, mouvements)  met en application (par des ordonnances) le  programme  du CNR, très "à gauche" (nationalisations, création de la Sécurité Sociale, vote des femmes, etc.) estimant qu'il faut répondre au désir de révolution sociale des Résistants tout en maintenant l'ordre (et jugeant habile de "couper l'herbe sous le pied" du PCF).



A1 -  Le GPRF dirigé par Charles de Gaulle doit d'abord prouver sa légitimité, comme le Général lui même entend montrer  qu'il incarne la France et parle en son nom (lui, auquel certains officiels des Etats-Unis ont reproché durant la guerre de "se prendre pour Jeanne d'Arc" et qui n'a été élu par personne, même si, grâce à l'action de Jean Moulin, la Résistance intérieure l'a reconnu comme son chef, ce qui en a fait le leader incontesté de la lutte contre l'Occupant, en métropole comme outre-mer).

- Il lui faut, dans un premier temps, être reconnu par la communauté internationale. L'accueil délirant fait par les Parisiens à Charles de Gaulle en juin 1944  amène enfin les Etats-Unis à  reconnaître officiellement le GPRF comme le gouvernement légal de la France.  Les autres pays étrangers  l'avaient fait plus tôt, considérant notamment le ralliement unanime des fonctionnaires et des autorités au fur et à mesure de la libération du teritoire métropolitain. 

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Le Tripartisme s'impose en effet entre 1945 et 1947. Socialistes de la SFIO et communistes (PCF) recueillent les uns et les autres  un quart des suffrages et sont, ensemble,  majoritaires en voix comme en sièges. Avec leur allié du MRP (Mouvement Républicain Populaire issu de la Résistance démocrate-chrétienne, organisée en France dans un parti non confessionnel) la majorité de gauche et du centre est soutenue par près de 80% des suffrages.  Elle ne veut pas entendre parler d'un exécutif fort et provoque par ses chicanes la démission du chef du gouvernement en janvier  1946. Le socialiste Felix Gouin lui succède pour quelques temps, mais il se retire  après le rejet d'un premier projet de constitution, monocaméral, en avril.
- Les projets des Constituants indisposant Charles de Gaulle, il entreprend - en vain - de faire adopter ses propres théories,  s'adressant directement aux Français pour demander, (notamment dans son fameux discours de Bayeux, prononcé en Juin 1946)   la mise en place d'un régime inspiré de loin par le modèle américain, doté d'un parlement à deux chambres et qui serait incarné par un chef de l'Etat désigné par  un collège de grands électeurs très élargi.- La Constitution de la IVème République, adoptée en Octobre, ne tient guère compte de cette préconisations même si elle établit le bicamérisme. Charles de Gaulle fonde alors le RPF (Rassemblement du peupe français) en 1947,  mais, si ce nouveau parti emporte immédiatement les élections municipales,  ce succès spectaculaire est sans lendemain : le "mouvement" gaulliste, opposé à la IVème République,  est très rapidement marginalisé. Ses cadres trahissent bientôt la consigne du général de ne participer à aucun gouvernement ; son chef  le dissout en 1953 pour entamer une longue et amère "traversée du désert"

A2 - De Gaulle organise rapidement la transition vers un pouvoir légal pérenne et la restauration de l'ordre républicain. Rétablissant les libertés publiques suspendues par Vichy, il entend par là rendre son rang au pays.

- Dès la Libération, Charles de Gaulle  impose une épuration judiciaire pour mettre fin le plus vite possible à l'épuration spontanée et à ses excès (femmes tondues, exactions diverses) puis il ordonne le désarmement des milices patriotiques  (les Résistants qui désirent combattre l'ennemi conservent leurs armes mais sont incorporés dans l'Armée régulière). Ses obssessions sont la participation de la France à la défaite allemande et le maintien de  l'unité nationale, l'Etat retrouvant le monopole des pouvoirs régaliens malgré les rancoeurs de certaines des "milices patriotiques" dissoutes à son initiative.

-  De Gaulle
organise rapidement des élections libres, escomptant qu'une majorité se dégagera pour soutenir son action. Il opte pour un mode de scrutin proportionnel par département (pour éviter un raz de marée communiste, prévisible en cas d'adoption du scrutin majoritaire uninominal)  et couple l'élection législative à un référendum sur le choix entre un retour aux institutions de la Troisième République et l'adoption d'une nouvelle constitution (cette dernière solution emporte une large adhésion de la part des électeurs et électrices - les femmes votent pour la première fois).  L'assemblée élue en 1945 est, par le choix des Français, une assemblée constituante : elle accorde à l'unanimité sa confiance au gouvernement présidé par Charles de Gaulle, qui  obtient que la France soit reconnue comme puissance victorieuse et qu'elle joue un rôle de premier plan dans la nouvelle organisation du monde (FMI, ONU, etc.).

A3 -  Malgré son immense popularité et le prestige dont il jouit, Charles de Gaulle ne parvient pas à imposer "sa vision" de ce que doivent être les institutions de la France. Il s'oppose aux formations dominant la scène politique, qui souhaitent toutes un retour au parlementarisme intégral, quand lu voudrait renforcer l'Exécutif

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